mardi 15 février 2011

LA MOUDJAHIDA "EL MANSOURIA"


A toutes celles qui, en ville et à la campagne, à l’intérieur mais aussi hors des frontières du pays, ont fait grandir la colère contre l’occupant. A toutes celles qui ont donné à la révolution leur vie et, mieux encore, la vie des êtres qu’elles chérissent. Pour elles, l’histoire écrira incontestablement un livre d’or aux multiples volumes.


Comment rendre hommage à toutes ces femmes qui ont inscrit en lettres d'or et de feu le combat libérateur ? Dans le contexte colonial hostile à toute activité féminine des Algériennes autre que domestique, la participation de la femme à la lutte armée a été tout simplement la confirmation d'une tradition révolutionnaire qui traverse les siècles. Fatma-Zohra Benhellel, plus connue sous le nom de guerre “ El Mansouria ”, naquit le 14 avril 1920 à Médéa. Elle fut élevée dans une famille pieuse et nationaliste à l'image de Si Ahmed Mansour Khodja, son mari et militant de la première heure, mort 19 mai 1956.


Aux côtés de ses six enfants, elle assura avec courage et une grande efficacité le rôle d'agent de liaison ainsi que la collecte de l'argent et du renseignement. Le domicile d’ « El Mansouria » à Berrouaghia plus précisément à la rue de la remonte, était un lieu de transit, de rencontres et un refuge pour les moudjahidine de la wilaya IV historique. Ce fut le cas, l'avant-veille d'une opération spectaculaire exécutée par un valeureux groupe de commando de l'ALN menée par le Commandant Si Mohamed Bousmaha (Si Mohamed Berrouaghia), et au cours de laquelle fut abattu le tristement célèbre Fleury, tortionnaire d'une trempe particulière. « El Mansouria », et sa fille aînée Kheïra « Wahiba » ainsi que quatre militantes seront internées pendant 11 mois (Août 1960 à novembre 1961) au centre de tortures de Damiette (Médéa) puis celui de Tefeschoun (entre la baignoire et la gégène), elle subira les pires sévices sans donner le moindre renseignement qui aurait pu mettre en danger ses compagnons de lutte. Elle se permettra même de gifler un colonel de l'armée coloniale, ce qui lui a valu deux mois au fond d'un cachot glacial. Dès sa sortie de prison et par arrêté du Préfet du département du Titteri - Chevalier de la légion d'honneur n° 1154/CAB/BSDN du 28 novembre 1961 , elle fût assignée à résidence à domicile pour une durée de trois mois. « El Mansouria » s'est éteinte le 16 février 2004.


Combien étaient-elles à être séquestrées, torturées, violées, victimes d’un génocide qui, sous le nom de répression avait fait plus d’un million et demi de victimes en Algérie ? Malgré des traditions séculaires, confinant les femmes dans des rôles subalternes, malgré le caractère restrictif des recensements de militants, effectués jusqu’à ce jour et occultant « le travail obscur et ingrat de la grande masse des femmes », les femmes algériennes, grâce à leur ingéniosité et à leur sens pratique, ont encore une fois rendu la résistance possible. Sans complexe, elles peuvent chanter avec Aragon, que c’est aussi grâce à elles, qu’on vit le soleil des visages, qu’on mit les drapeaux aux maisons.

1 commentaire:

Asphodèle a dit…

Bonjour ! Une amie m'a conseillée de lire votre blog. Je suis française née à Constantine en 1957 où mon père était gendarme pendant cette guerre ! Je n'avais jamais entendu que "sa" version et j'ai lu récemment un livre qui m'a ébranlée "Djebel" de Gilles Vincent. Et mon pseudo (choisi vraiment par hasard) est Asphodèle... comme quoi ! De feuilleter vos articles m'a émue au plus haut point et je ne sais pas si demander pardon est encore possible avec tout ce sang qui n'a pas encore séché dans certains coeurs...